Synthèses des conférences 2014

Outils émergents | Outils émergents, Neil MARSDEN, Alexandros GOUVATSOS, Akouvi AHOOMEY, Andrew TOUCH, Tarik ABDEL-GAWAD, Tom BOX, Aurélien CHARRIER, Grant GILBERT, (modérateur Cédric GUIARD) © D. Bouchet/CITIA

Outils émergents

  1. Intervenants
  2. Modérateur
  3. Optimisation de la préproduction des séries TV : Redboard
  4. Akeytsu : un logiciel 3D 'vraiment' orienté artistes
  5. Unity Technologies : le nouveau 'moteur' de l’animation
  6. DBLG et Blue-Zoo créent des ours en impression 3D
  7. Bot & Dolly : le robot mis en scène

Sommaire

La conférence sur les outils émergents vise évidemment à faire connaître de nouveaux outils, mais s’interroge aussi sur les contours de la notion et la définition de ce que recouvre l’animation. Le studio britannique Hibbert Ralph Animation a développé Redboard, un outil de prévisualisation d’animation dès la phase de storyboard. Nukeygara est une jeune société française qui propose le logiciel 3D Akeytsu, qui s’affranchit du rigging classique pour animer plus facilement. L’animation stop-motion innove également grâce aux sociétés DBLG et Blue-Zoo Animation en s’appuyant sur l’impression 3D. Le jeu vidéo est une autre source d’inspiration et les récentes orientations de la plateforme Unity le prouvent : prototypage visuel, storytelling interactif, extended storytelling sont autant de propositions d’ouverture intégrant la plateforme de jeu. Enfin, les robots de Bot & Dolly qui ont magnifiquement servi à la mise en images de Gravity allient virtuosité et précision d’orfèvre pour une approche de l’image tout en finesse.

Intervenants :

Modérateur :

Mots clés

Bot & Dolly, Box, robotique, Gravity, Unity, prototypage visuel, storytelling interactif, extended storytelling, Nukeygara, Akeytsu, 3D, rigging, Blue-Zoo, DBLG, Bears, stairs, impression 3D, Hibbert Ralph, Redboard, previz, layout, storyboard 

Optimisation de la préproduction des séries TV : Redboard

La société britannique Hibbert Ralph Animation a présenté Redboard, un outil de storyboarding et de gestion de production qui va au-delà du storyboard 3D, en se basant sur le jeu vidéo. Utilisé au stade de la préproduction, il permet d’intégrer tous les éléments d’une scène 3D (décors, personnages) au sein d’une même interface. "Ensuite, le storyboarder peut interactivement agir sur le layout en utilisant les modèles importés, en les plaçant dans les positions souhaitées, en disposant les caméras telles que voulues", explique Neil Marsden qui, avec Alex Gouvatsos, a mis au point le logiciel. Une fois les éléments mis en place, une couche supplémentaire (layer) vient se placer au-dessus de la scène pour dessiner les détails, expressions et poses de personnages nécessaires à l’action. Outre cette possibilité de "dessin à la main", Redboard supporte les outils d’édition de Photoshop pour ajouter des niveaux de détail, en fonction des besoins de production. Redboard est compatible avec la majorité des logiciels de montage (Apple Final Cut Pro, Avid Media Composer, Adobe Premiere, Sony Vegas). À partir de l’un de ces logiciels, Redboard propose une EDL (Edit Detail List) standard permettant de réaliser un montage basique sur le timing d’animation ou la création automatique de feuilles de route d’expo.

Lorsque le storyboard est validé, Redboard réalise l’export de l’intégralité de la scène et de tous ses éléments vers les outils Autodesk (Maya, 3ds Max, Softimage XSI) : toutes les informations sont embarquées durant l’export, y compris les placements de caméras et, naturellement, la couche supplémentaire de dessin.

Hibbert Ralph Animation a également collaboré aux travaux du Centre for Digital Entertainment de l’université de Bournemouth qui visent à développer des outils d’optimisation du flux de production, notamment en phase de préproduction et sur les séries TV. En utilisant la Kinect ou encore la PlayStation Eye, "on peut facilement réaliser de la capture de mouvement sans marqueurs à moindre coût pour créer des squelettes basse définition", explique Neil Marsden. "Si un acteur joue le storyboard qui défile devant lui, l’outil peut capter les mouvements, éditer des poses clés et les jouer directement dans Maya."

Akeytsu : un logiciel 3D 'vraiment' orienté artistes

Fondée par Aurélien Charrier et Yannick Rousseau, Nukeygara est une société de développement de logiciels CG et son premier outil actuellement en développement s’appelle Akeytsu. "J’ai commencé par analyser la complexité qui régit l’ensemble des logiciels actuels sur le marché, notamment sur la partie rigging, pour offrir une alternative qui serait plus orientée artistes", précise Aurélien Charrier qui estime que les outils utilisés actuellement par les animateurs n’ont pas été initialement conçus pour eux, transformant de facto l’artiste en technicien.

Pour le lauréat du prix Ganuta 2013 décerné par le pôle de compétitivité rhône-alpin Imaginove, le logiciel permet de "créer et modifier très rapidement des personnages en ne se basant plus sur des rigs complexes. On démarre avec un seul squelette, un seul skinning et quelques solveurs pour commencer à animer. Un modèle peut ainsi être prêt pour l’animation en deux jours environ."

L’un des points clés du logiciel est de partir du mesh : un clic sur celui de la jambe gauche, par exemple, et c’est toute la zone concernée qui est mise en surbrillance et ouverte à tous les contrôles possibles. "L’intérêt de jouer sur le mesh est d’avoir une approche plus fluide. Ensuite, le logiciel dispose de solveurs d’IK qui intègrent des fonctionnalités d’animation options avancées comme n’importe quel autre logiciel" (stretch, auto-reverse-foot, etc.).

Akeytsu propose une interface épurée avec un viewport qui prend l’intégralité de la fenêtre, une banque d’animation pour stocker les rushes à gauche de l’interface. On trouve également un spinner, avec un design de roue et conçu pour être "un hub de manipulation et de transformation 2D ; il suffit de le placer à côté de votre personnage et de jouer les effets recherchés via un simple clic, alors que les autres logiciels nécessitent de tourner sans cesse sur les axes".

Placé à droite de l’écran, le stacker est un éditeur keyframe qui permet de visualiser, pour chaque clé d’animation, les informations qui lui sont associées : numéro de l’image clé, timing, etc. La modification se fait non plus via une barre temporelle (time bar) mais au clavier numérique, pour une approche encore plus fine. "Nous sommes partis de l’ancienne feuille d’expo telle qu’on la connaissait pour proposer un outil intuitif… même si nous avons aussi la possibilité de travailler avec une time bar, non visible automatiquement mais qu’on peut appeler", explique Aurélien Charrier. Le format d’entrée et de sortie du logiciel est le FBX, compatible avec Maya.

Unity Technologies : le nouveau 'moteur' de l’animation

Unity est un logiciel 3D temps réel largement présent dans le secteur du jeu vidéo mais, de plus en plus, le secteur de l’animation tend à utiliser cet outil dans ce qu'Andrew Touch, chargé de la promotion du produit, appelle le "non-jeu". Afin d’inciter les productions à s’appuyer sur la plateforme, ce dernier a présenté quelques utilisations récentes dans des secteurs a priori non concernés par le jeu. Le premier exemple est Nvyve, basé en Ontario, qui crée des contenus 3D immersifs principalement pour le secteur de l’architecture : "S’ils utilisent Maya et 3ds Max pour la création de leurs modèles, Unity est leur moteur temps réel qui permet de se déplacer dans l’environnement comme on le souhaite", souligne Andrew Touch.

Le Royal Philarmonic Concert Orchestra a joué en 2013 Les Quatre Saisons dans une nouvelle orchestration avec, derrière lui, un écran géant. "La société Play Nicely a réalisé une animation 3D ‒ 3ds Max pour les modèles, Unity pour l’animation ‒ basée sur les sonnets et qui accompagne la musique ; celle-là interagit avec les variations d’intensité des musiciens comme une réponse, générée en temps réel." Le secteur médical tend de plus en plus lui aussi vers la visualisation temps réel, notamment la chirurgie pour mieux appréhender les organes à opérer.

Pour Andrew Touch, le secteur de l’animation peut s’emparer des potentialités de Unity dans trois domaines que sont : le prototypage visuel, le storytelling interactif et le storytelling augmenté. Dans le premier cas, "le fait d’intégrer Unity dans son pipeline de production permet de naviguer dans une scène 3D, construite avec n’importe quel logiciel du marché", et d’y apporter toutes les modifications nécessaires directement dans Unity Maya. "On se déplace en mode FPS, donc en mode subjectif et en temps réel."

Autre porte d’entrée : le storytelling interactif. Andrew Touch a pris comme exemple World of Violet, une app (Android, Windows) pour les enfants avec un design cartoon. Fondée sur la possibilité d’interagir directement sur les histoires, sous forme d’épisodes, via des coloriages, des modifications d’éléments narratifs, toujours en temps réel, cette app a été conçue par le collectif Brotherhood of Skills.

Unity est disponible en version gratuite, payante (en fonction du chiffre d’affaires) ou en licence perpétuelle.

DBLG et Blue-Zoo créent des ours en impression 3D

C’est en 2012 que l’agence de design graphique DBLG a concouru pour la refonte de la marque Animal Planet, un site de vidéos animalières et naturalistes, filiale de Discovery. "Nous avons réalisé les concepts mais nous avions besoin d’un partenaire afin de créer en 3D les petites animations qui devaient servir à mettre la chaîne en valeur", explique Grant Gilbert, fondateur de DBLG. L’agence fait appel à Blue-Zoo Animation qui conçoit, à partir des designs 2D, les modèles 3D correspondants. "Grant cherchait un look papier plié, ce qui nécessitait de créer des modèles en low polygons", poursuit Tom Box de Blue-Zoo Animation. "Les animaux, incluant notamment des ours et pingouins, ont ensuite été intégrés dans des environnements eux aussi en low polygons avant de les animer en boucle, comme un GIF d’animation."

Désireux de conserver une trace physique de ces animaux, DBLG a fait l’acquisition d’une imprimante 3D (MakerBot Replicator 2) et, rapidement, l’idée de créer une histoire via l’impression de modèles est apparue : Bears on Stairs. "Nous avons commencé par créer une section d’escalier roulant à divers stades de montée", précise Grant Gilbert. Ce dernier a contacté Blue-Zoo afin de reprendre le modèle de l’ours modélisé avec Maya. "Quand Grant nous a expliqué son idée de faire du stop-motion à base d’éléments imprimés en 3D, avec un ours grimpant l’escalier, nous avons dû revoir entièrement le personnage, du rigging à l’animation, pour que sa montée soit crédible", rappelle Tom Box.

Le film Bears on Stairs comporte 50 images (environ 2 secondes d’animation) soit 50 impressions 3D à effectuer à raison de 2h30 par sculpture. Le résultat est visible sur dblg.co.uk. Le film a été vu plus de 500 000 fois sur Vimeo et "certains ont d’abord pensé qu’il s’agissait de modèles 3D, mais ce skinning si particulier, avec toutes les strates liées à l’impression 3D aurait été tout bonnement impossible à restituer sans de nombreuses heures de travail", conclut Grant Gilbert. "Avec l’impression 3D et le stop-motion, nous avons réalisé une expérience en prenant notre temps et cela a marché."

Bot & Dolly : le robot mis en scène

Filiale d'Autofuss fondée en 2010 par Jeff Linnell et Randy Stowell, Bot & Dolly propose des solutions de bras automatisés, basées sur un système IRIS et gérées par des logiciels spécialisés dans le domaine du cinéma, l’architecture, etc. Si leur première commande d’importance provient de Louis Vuitton pour un clip publicitaire, c’est en 2012 que Bot & Dolly est approchée par Google afin qu’elle mette au point une expérience interactive autour de son media center en forme de boule, le Nexus Q. Même si, depuis, le Nexus est définitivement sorti du marché, Google a été suffisamment intéressé par les travaux de Bot & Dolly pour faire l’acquisition de la société en 2013 tout en lui laissant une complète indépendance.

C’est en 2011 que Bot & Dolly prend une réelle ampleur en participant au tournage du long métrage d’Alfonso Cuarón, Gravity ; il s’agissait de chorégraphier des mouvements de caméras (motion control) fixées sur les bras robotisés, parfaitement synchronisés avec le jeu des acteurs, la mise en scène et les décors numériques. "Plutôt que de faire bouger un acteur dans un environnement donné, les robots géraient les mouvements des caméras, des éléments de décors et la lumière autour d’eux", résume Tarik Abdel-Gawad, Creative Technologist chez Bot & Dolly.

Ce dernier a ensuite présenté Box, un court métrage à visée promotionnelle qui met en scène un acteur (lui-même) entouré de deux panneaux rectangulaires fixés sur des bras robotisés : "Nous avons testé le projection mapping sur des objets en mouvement en projetant des éléments très graphiques qui donnent une impression de profondeur et de déplacements".

Pour parvenir à ce résultat qui allie innovations technologiques et illusion pure, Bot & Dolly a dans un premier temps installé deux bras robotisés et leurs rails dans un hangar. En parallèle, avec leur logiciel propriétaire de modélisation et d’animation, BDMove, ils ont intégralement recréé le plateau, les deux bras et les panneaux sur lesquels allaient être projetées les images numériques réalisées conjointement avec Maya. "Nous avons également utilisé Houdini et le framework ouvert Alembic de Google pour matcher les mouvements des caméras virtuelles, les déplacements des bras et les éléments 3D projetés." Le résultat est extraordinaire, et visible sur botndolly.com/box

Rédigé par Stéphane Malagnac, Prop'Ose, France

Traduit par Sheila Adrian

Les synthèses des conférences Annecy 2014 sont réalisées avec le soutien de :

DGCIS      Ministère de l'économie, du redressement productif et du numérique      Région Rhône-Alpes

Conférences organisées par CITIA CITIA

sous la responsabilité éditoriale de René Broca et Christian Jacquemart

Contact : christellerony@citia.org

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